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FDA - NEWS

EDITO - Il faudra bien se couvrir !

Christian Reuter
21 février 2023

Il faudra bien se couvrir

Augmentation du salaire minimum de 3,2 pour cent à partir de janvier. Tranche indiciaire en février. Tranche indiciaire en avril. Tranche indiciaire attendue en fin d'année et engagement du gouvernement à fournir des compensations à cet égard.

Les salaires augmentent donc cette année d'un peu plus de 10 pour cent dans un contexte déjà très difficile pour l'artisanat.

Explosion des prix des matériaux et de l'énergie, hausse massive des taux d'intérêt, le tout accompagné d'un effondrement de la demande. Comme l'a révélé une enquête de la Fédération des Artisans, chaque secteur est concerné et toutes les entreprises sont confrontées à des problèmes similaires.

L'activité principale de toutes les entreprises artisanales à forte intensité de main-d'œuvre est la réalisation d'heures productives. Une heure est dite productive lorsqu'elle peut être facturée à un client. Si, par exemple, la construction bourdonne, la demande d'heures productives est élevée et les entreprises n'ont généralement pas le personnel nécessaire pour répondre à la demande et parlent de pénurie de main-d'œuvre qualifiée. Si la demande d'heures productives s'effondre, il ne faut pas longtemps pour que les commandes ne suffisent pas à occuper l’ensemble des collaborateurs. Comme, contrairement à ce que l'on pense, la rentabilité des bonnes entreprises se situe autour de 5 pour cent, il n'y a que peu réserves pour pouvoir supporter un « sous-emploi » à long terme. La situation peut donc basculer très rapidement et très radicalement.

Le gouvernement est prêt à tout pour préserver le pouvoir d'achat des électeurs, mais à quoi bon si ces derniers ne dépensent pas.

Rien que l'indexation des salaires signifie qu'une entreprise de dix personnes doit payer un onzième homme ou une onzième femme sans que ceux-ci ne prestent en contrepartie des heures productives et contribuent à couvrir les coûts.

A la fin de l'année, l'écart salarial se sera à nouveau considérablement creusé. Comme le Premier ministre Xavier Bettel l'a fait remarquer dans son interview du Nouvel An, il profitera nettement plus de l'indexation des salaires que le petit employé. Après 3 tranches d'indexation, ce dernier aura 174 euros de plus dans sa poche et le Premier ministre rapportera 1.500 euros supplémentaires à la maison alors que l'alimentation, l'énergie, la mobilité, les vêtements etc. augmenteront de la même manière pour tout le monde. Pour l'OGB-L, ce système est le pilier d'un modèle social juste, ce qui devrait permettre à chacun de comprendre quelle conception de justice est à la base du syndicat. Derrière la façade de lutte des classes, on s'assure que l'on donne beaucoup à ceux qui ont beaucoup. Il en résulte que le revenu médian augmente et qu'un plus grand nombre de salariés avec de petites tranches d'indexation est ainsi exposé au risque statistique de pauvreté. Le même OGB-L dénoncera cette situation et demandera comment cela peut être possible au Luxembourg, pays soi-disant si riche. La politique et les médias avalent l'histoire. Si une voix critique se fait entendre, on joue la carte de la fiscalité. La politique sociale ne se fait pas avec l'index, mais avec les impôts. La question reste complètement ouverte comment l'écart de 1.300 euros entre le Premier ministre et le petit employé sera comblé par les impôts, et les médias n'en parlent pas non plus.

Dans la même interview, le Premier ministre a laissé entendre qu'il considère également l'indexation des salaires comme problématique en termes de justice sociale. Mais comme l'OGB-L refuse catégoriquement de parler de ce sujet, il n'y a pas grand-chose à faire...

Eh bien, on reste perplexe face à tant de courage politique. Les prochaines élections servent apparemment à déterminer qui pourra jouer au gouvernement sous la botte de l’OGB-L. Il y aurait aussi beaucoup à dire sur les années Juncker, mais à l'époque les gouvernements ont réussi à garder l’initiative et à prendre l'une ou l'autre décision impopulaire lorsque c'était pour le bien du grand tout.

Les différents partis préparent actuellement leurs programmes électoraux et la Fédération des Artisans est en train de mener des entretiens et de soumettre les positions et les propositions de l'artisanat.

Malgré toutes les revendications, il reste le constat impopulaire que le gâteau à distribuer doit d'abord être cuit. Chaque euro gagné, distribué et investi doit d'abord être généré dans une entreprise. Ce fait est également valable pour la bulle de prospérité qu'est le Luxembourg, même si de moins en moins de politiciens et de citoyens veulent l'admettre à notre époque post-factuelle.